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Dom Juan ou le Festin de pierre est une comédie en cinq actes et en prose que Molière a écrite assez rapidement après l’interdiction du Tartuffe. La pièce met en scène un noble libertin, un homme qui ne respecte aucun principe, ni moral ni religieux ; il n’hésite pas à promettre le mariage aux femmes qu’il veut séduire, puis il les abandonne. Il affirme à son valet ne pas croire au Ciel et ne cesse de le provoquer en bafouant les sacrements du mariage ou en invitant à dîner par dérision la statue d’un Commandeur qu’il a naguère tué. Dans l’acte IV, la statue se rend au dîner et invite Dom Juan qui accepte par défi.

Dans l’acte V, Dom Juan montre un nouveau visage et pousse loin l’hypocrisie en prenant l’apparence d’un dévot, un homme très attaché aux pratiques religieuses, ce qui apparaît comme une nouvelle provocation envers le Ciel. La pièce s’achève par ces deux dernières scènes qui mettent en scène un nouveau personnage, le Spectre.


Photographies de la mise en scène de Francis Huster (1987) avec Jacques Weber (Dom Juan) et Francis Huster (Sganarelle) http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b9002453f
Photographies de la mise en scène de Marcel Maréchal (1988) avec Pierre Arditi (Dom Juan) et Marcel Maréchal (Sganarelle) http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b9061045v.r=Dom+Juan.langFR
Photographies de la mise en scène de Jacques Lasalle (1993) avce Andrzej Seweryn (Dom Juan) et Roland Bertin (Sganarelle) http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b90772055.r=Dom+Juan.langFR
Le manuscrit de Don Giovanni, opéra sur le mythe de Dom Juan de Wolfgang Amadeus Mozart et Lorenzo da Ponte http://blog.bnf.fr/gallica/index.php/2012/02/21/le-manuscrit-de-don-giovanni/

Scène 5

LE SPECTRE. Don Juan n'a plus qu'un moment à pouvoir profiter de la miséricorde du Ciel ; et s' il ne se repent ici, sa perte est résolue.

SGANARELLE. Entendez-vous, Monsieur ?

DON JUAN. Qui ose tenir ces paroles ? Je crois connaître cette voix.

SGANARELLE. Ah ! monsieur, c' est un spectre : je le reconnais au marcher.

DON JUAN. Spectre, fantôme, ou diable, je veux voir ce que c'est.
(Le spectre change de figure et représente le Temps avec sa faux à la main.)

SGANARELLE. Ô Ciel ! voyez-vous, monsieur, ce changement de figure ?

DON JUAN. Non, non, rien n' est capable de m' imprimer de la terreur, et je veux éprouver avec mon épée si c'est un corps ou un esprit.
(Le spectre s'envole dans le temps que Don Juan le veut frapper.)

SGANARELLE. Ah ! monsieur, rendez-vous à tant de preuves, et jetez-vous vite dans le repentir.

DON JUAN. Non, non, il ne sera pas dit, quoi qu' il arrive, que je sois capable de me repentir. Allons, suis-moi.
Scène 6

LA STATUE. Arrêtez, Don Juan : vous m' avez hier donné parole de venir manger avec moi.

DON JUAN. Oui. Où faut-il aller ?

LA STATUE. Donnez-moi la main.

DON JUAN. La voilà.

LA STATUE. Don Juan, l' endurcissement au péché traîne une mort funeste, et les grâces du Ciel que l'on renvoie ouvrent un chemin à sa foudre.

DON JUAN. Ô Ciel ! que sens-je ? Un feu invisible me brûle, je n' en puis plus, et tout mon corps devient un brasier ardent ! Ah !
(Le tonnerre tombe avec un grand bruit et de grands éclairs sur Don Juan ; la terre s'ouvre et l'abîme ; et il sort de grands feux de l'endroit où il est tombé.)

SGANARELLE. [Ah ! mes gages ! mes gages !] Voilà par sa mort un chacun satisfait : Ciel offensé, lois violées, filles séduites, familles déshonorées, parents outragés, femmes mises à mal, maris poussés à bout, tout le monde est content. Il n' y a que moi seul de malheureux... [Mes gages ! mes gages, mes gages !]

Molière
Dom Juan, acte V, scènes 5 et 6 
1665