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Il s'agit d'une comédie gaie, enjouée qui célèbre le bonheur de vivre. Mais en même temps, à travers les portraits très élaborés des domestiques, la critique sociale occupe une place importante dans la pièce. Les élans amoureux de Figaro et son combat pour trouver sa véritable identité font de lui un personnage complet, digne des grandes tragédies du XVIIe siècle. Figaro fait tout pour que le Comte ne lui vole pas la femme qu'il aime. Le but de l'intrigue est de parvenir à ce mariage.

À l’acte I, les noces de Figaro se préparent dans le château du Comte Almaviva à Aguas Frescas, près de Séville. Suzanne apprend à son fiancé que le Comte la veut comme maîtresse. Le valet veut piéger le Comte et déjouer ses projets. De son côté, le Comte veut l’évincer en le forçant à épouser Marceline, qui se révélera être la mère de Figaro, mais tout le monde l’ignore au début de l’acte II. Chérubin courtise Suzanne également. La cérémonie du mariage est reportée car une foule de valets et de paysans exige du Comte la suppression du droit de seigneur. Le Comte veut envoyer Chérubin, dont il est jaloux, à l’armée. Heureusement Figaro lui explique au page comment rester au château. L’acte II commence par un tête-à-tête entre Suzanne et la Comtesse qui lui livre ses doutes. La conversation porte aussi sur Chérubin et le ruban qu’il a volé à Rosine.


https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b90066645
http://gallica.bnf.fr/essentiels/beaumarchais/mariage-figaro : le contexte ; la Comédie-Française ; l’œuvre en images.
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b9006683h/f1.item : un costume de Figaro
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b9060405d : photographies d’une mise en scène d’Antoine Vitez
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k8808203z : enregistrement sonore du Mariage de Figaro
https://www.youtube.com/watch?v=Ib7V_gHWX94 : mise en scène de la compagnie Colette Roumanoff

ACTE DEUXIÈME
Le théâtre représente une chambre à coucher superbe, un grand lit en alcôve, une estrade au-devant. La porte pour entrer s’ouvre et se ferme à la troisième coulisse à droite ; celle d’un cabinet, à la première coulisse à gauche. Une porte, dans le fond, va chez les femmes. Une fenêtre s’ouvre de l’autre côté.
Scène 1
SUZANNE , LA COMTESSE
entrent par la porte à droite.

LA COMTESSE se jette dans une bergère.– Ferme la porte, Suzanne, et conte-moi tout dans le plus grand détail.
SUZANNE – Je n’ai rien caché à Madame.
LA COMTESSE – Quoi ! Suzon, il voulait te séduire ?
SUZANNE – Oh ! que non ! Monseigneur n’y met pas tant de façon avec sa servante : il voulait m’acheter.
LA COMTESSE – Et le petit page était présent ?
SUZANNE – C’est-à-dire caché derrière le grand fauteuil. Il venait me prier de vous demander sa grâce.
LA COMTESSE – Hé ! pourquoi ne pas s’adresser à moi-même ? Est-ce que je l’aurais refusé, Suzon ?
SUZANNE – C’est ce que j’ai dit : mais ses regrets de partir, et surtout de quitter Madame ! « Ah ! Suzon, qu’elle est noble et belle ! mais qu’elle est imposante ! »
LA COMTESSE – Est-ce que j’ai cet air-là, Suzon ? Moi qui l’ai toujours protégé.
SUZANNE – Puis il a vu votre ruban de nuit que je tenais ; il s’est jeté dessus…
LA COMTESSE, souriant – Mon ruban ?… Quelle enfance !
SUZANNE – J’ai voulu le lui ôter ; madame, c’était un lion ; ses yeux brillaient… Tu ne l’auras qu’avec ma vie, disait-il en forçant sa petite voix douce et grêle.
LA COMTESSE, rêvant. – Eh bien, Suzon ?
SUZANNE – Eh bien, madame, est-ce qu’on peut faire finir ce petit démon-là ? Ma marraine par-ci ; je voudrais bien par l’autre : et parce qu’il n’oserait seulement baiser la robe de Madame, il voudrait toujours m’embrasser, moi.
LA COMTESSE, rêvant – Laissons… laissons ces folies… Enfin, ma pauvre Suzanne, mon époux a fini par te dire…
SUZANNE – Que si je ne voulais pas l’entendre, il allait protéger Marceline.
LA COMTESSE se lève et se promène, en se servant fortement de l’éventail. – Il ne m’aime plus du tout.
SUZANNE – Pourquoi tant de jalousie ?
LA COMTESSE – Comme tous les maris, ma chère ! uniquement par orgueil. Ah ! je l’ai trop aimé ; je l’ai lassé de mes tendresses et fatigué de mon amour : voilà mon seul tort avec lui ; mais je n’entends pas que cet honnête aveu te nuise, et tu épouseras Figaro. Lui seul peut nous y aider : viendra-t-il ?
SUZANNE – Dès qu’il verra partir la chasse. […]

Pierre-Augustin Caron de Beaumarchais
La Folle journée ou le Mariage de Figaro, II,1 (Confidences entre maîtresse et servante )
Écrite en 1778, lue en 1781, autorisée en 1784