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Arthur Rimbaud, adolescent fugueur, né en 1854, a écrit un ensemble de vingt-deux poèmes recueillis sous le titre Les Cahiers de Douai, manuscrits remis à un éditeur de Douai, Paul Demeny qu’il rencontre par l’intermédiaire de son professeur de rhétorique, Georges Izambard. Le premier cahier regroupe quinze poèmes, le second sept. On est en 1870 : le poète a écrit ces poèmes à l’âge de quinze ou seize ans. Un an plus tard, il demandera à Demeny de « brûle(r) tous les vers qu’(il) fu(t) assez sot pour (lui) donner lors de (son) séjour à Douai ». Cette volonté ne sera pas respectée. A vingt ans, il renoncera à la littérature pour se consacrer à une vie de négociant et d’explorateur en Afrique. La première édition de ses œuvres complètes date de 1895, avec une préface de Paul Verlaine. Rimbaud est mort en 1891, à l’âge de trente-sept ans.

La France a déclaré la guerre à la Prusse le 19 juillet 1870 et la bataille de Sedan (qui n’est qu’à vingt-quatre kilomètres de Charleville, ville natale d’Arthur Rimbaud) est une cuisante défaite le 1er septembre de la même année. Les Français portaient des uniformes rouges (« écarlates » dans le texte) et les Prussiens étaient en vert. Rimbaud n’a pas l’âge de faire la guerre quand il écrit ce sonnet en alexandrins ; cela a surtout eu comme conséquence d’interrompre ses études.


BNF – Les Essentiels https://essentiels.bnf.fr/fr/mot-cle/04a67b5a-12e4-452c-89f3-d47e09da7a24-arthur-rimbaud
Œuvres d’Ernest Pignon-Ernest sur Arthur Rimbaud (1978) https://pignon-ernest.com/
Un été avec Rimbaud : très courtes émissions de radio (épisodes de 3 minutes environ) présentant la vie et l’œuvre de Rimbaud, par Sylvain Tesson https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/un-ete-avec-rimbaud

1
Tandis que les crachats rouges de la mitraille
 
Sifflent tout le jour par l’infini du ciel bleu ;
 
Qu’écarlates ou verts, près du Roi qui les raille,
 
Croulent les bataillons en masse dans le feu ;

5
Tandis qu’une folie épouvantable broie
 
Et fait de cent milliers d’hommes un tas fumant ;
 
– Pauvres morts ! dans l’été, dans l’herbe, dans ta joie,
 
Nature ! ô toi qui fis ces hommes saintement !... –

9
– Il est un Dieu, qui rit aux nappes damassées
 
Des autels, à l’encens, aux grands calices d’or ;
 
Qui dans le bercement des hosannah s’endort,

12
Et se réveille, quand des mères, ramassées
 
Dans l’angoisse, et pleurant sous leur vieux bonnet noir,
 
Lui donnent un gros sou lié dans leur mouchoir !


Arthur Rimbaud
Les Cahiers de Douai , 1er cahier « Le Mal »
1895