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Jean-Luc Lagarce écrit Juste la fin du monde en 1990, alors qu’il se sait atteint du sida. La pièce comporte deux parties, séparées par un intermède. Louis, 34 ans, revient vers sa famille après des années d’absence. Il retrouve sa mère, sa petite sœur Suzanne, son frère Antoine, marié à Catherine. Venu pour leur annoncer sa mort prochaine, il ne parvient pas à leur parler et le temps s’écoule, ponctué par les colères d’Antoine, les souvenirs amers et les vaines tentatives de communication entre les différents membres de la famille.

Quand Louis arrive dans la maison occupée par sa mère et sa sœur, il tente de renouer le lien rompu avec chaque membre de la famille, fait la connaissance de Catherine, sa belle-soeur. Antoine et de Catherine se querellent, tandis que la Mère et Suzanne reviennent sur le passé et sur les années d’absence de Louis. Pas de didascalie, à l’exception de la didascalie initiale : « Cela se passe dans la maison de la Mère et de Suzanne, un dimanche, évidemment, ou bien encore durant près d’une année entière. »


Extrait de mise en scène : https://www.theatre-contemporain.net/spectacles/Juste-la-fin-du-monde-20323/ https://www.reseau-canope.fr/edutheque-theatre-en-acte/oeuvre/jean-luc-lagarce-1/juste-la-fin-du-monde.html
Ressources pédagogiques : https://eduscol.education.fr/odysseum/juste-la-fin-du-monde-de-jean-luc-lagarce-lire-analyser-mettre-en-jeu


LA MÈRE. - Cela ne me regarde pas,
je me mêle souvent de ce qui ne me regarde pas, je ne change pas, j'ai toujours été ainsi.
Ils veulent te parler, tout ça,
je les ai entendus
mais aussi je les connais,
je sais,
comment est-ce que je ne saurais pas ?
Je n'aurais pas entendu, je pourrais plus simplement encore deviner,
je devinerais de moi-même, cela reviendrait au même.
Ils veulent te parler,
ils ont su que tu revenais et ils ont pensé qu'ils pourraient te parler,
un certain nombre de choses à te dire depuis longtemps et la possibilité enfin.

Ils voudront t'expliquer mais ils t'expliqueront mal,
car ils ne te connaissent pas, ou mal.
Suzanne ne sait pas qui tu es,
ce n'est pas connaître, cela, c'est imaginer,
toujours elle imagine et ne sait rien de la réalité,
et lui, Antoine,
Antoine, c'est différent,
il te connaît mais à sa manière comme tout et tout le monde,
comme il connaît chaque chose ou comme il veut la connaître,
s'en faisant une idée et ne voulant plus en démordre.

Ils voudront t'expliquer
et il est probable qu'ils le feront
et maladroitement,
ce que je veux dire,
car ils auront peur du peu de temps que tu leur donnes,
du peu de temps que vous passerez ensemble
– moi non plus, je ne me fais pas d'illusion, moi aussi je me doute que tu ne vas pas traîner très longtemps auprès de nous, dans ce coin-ci.

Jean-Luc LAGARCE
Juste la fin du monde , Partie I, scène 8 (début de la tirade de La mère, adressée à Louis)
1990