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La censure que subit le recueil des Fleurs du Mal contraint son auteur à en proposer une nouvelle structure. Il est traversé par des thèmes comme le Spleen et l’attrait pour la mort qui traduisent un mal-être évident. Le lyrisme de Baudelaire le rapproche des Romantiques par sa dimension sensible mais s’en sépare par sa visée : il s’agit « d’extraire la beauté du Mal » et de suivre une esthétique plus épurée à l’instar de Théophile Gautier auquel il dédicace son ouvrage. Les Fleurs du mal reposent sur « l’irrégularité, c’est-à-dire l’inattendu, la surprise, l’étonnement qui sont une partie essentielle et la caractéristique du Beau ».

Ce sonnet exprime la malédiction du poète. En effet, celui-ci confesse l’impuissance créatrice par des symboles, celui de l’hiver, saison représentative du Spleen et de la tristesse et celui de la cloche, en tant qu’image de l’âme.


Un Masque sonne le glas funèbre, Odile Redon : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b69509930.r

1
II est amer et doux, pendant les nuits d'hiver,
 
D'écouter, près du feu qui palpite et qui fume,
 
Les souvenirs lointains lentement s'élever
 
Au bruit des carillons qui chantent dans la brume.

5
Bienheureuse la cloche au gosier vigoureux
 
Qui, malgré sa vieillesse, alerte et bien portante,
 
Jette fidèlement son cri religieux,
 
Ainsi qu'un vieux soldat qui veille sous la tente!

9
Moi, mon âme est fêlée, et lorsqu'en ses ennuis
 
Elle veut de ses chants peupler l'air froid des nuits,
 
II arrive souvent que sa voix affaiblie

12
Semble le râle épais d' un blessé qu' on oublie
 
Au bord d'un lac de sang, sous un grand tas de morts
 
Et qui meurt, sans bouger, dans d'immenses efforts.


Charles Baudelaire
Les Fleurs du mal, « Spleen et Idéal » « La Cloche fêlée »
1857