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Le premier recueil que Verlaine a composé à l’âge de 22 ans, intitulé Poèmes saturniens (1866), évoque Baudelaire que le jeune homme admirait. Verlaine avait commencé à boire et lorsque sa cousine Elisa dont il était amoureux meurt en 1867, il noie son chagrin dans l’alcool. En 1869, il publie un court recueil de poèmes Fêtes galantes qui lui ont été inspirés par des tableaux de peintres du XVIIIe siècle, que le Louvre vient d'exposer dans de nouvelles salles.

Ce poème qui est le dernier des vingt-deux textes du recueil des Fêtes Galantes (1869) apporte une touche finale bien moins légère.

Colloque sentimental
1
Dans le vieux parc solitaire et glacé
 
Deux formes ont tout à l'heure passé.

3
Leurs yeux sont morts et leurs lèvres sont molles,
 
Et l'on entend à peine leurs paroles.

5
Dans le vieux parc solitaire et glacé
 
Deux spectres ont évoqué le passé.

7
- Te souvient-il de notre extase ancienne ?
 
- Pourquoi voulez-vous donc qu'il m'en souvienne ?

9
- Ton coeur bat-il toujours à mon seul nom ?
 
Toujours vois-tu mon âme en rêve ? - Non.

11
Ah ! les beaux jours de bonheur indicible
 
Où nous joignions nos bouches ! - C'est possible.

13
- Qu'il était bleu, le ciel, et grand, l'espoir !
 
- L'espoir a fui, vaincu, vers le ciel noir.

15
Tels ils marchaient dans les avoines folles,
 
Et la nuit seule entendit leurs paroles.


Paul Verlaine
Les Fêtes galantes, « Colloque sentimental » 
1869